Le monde dans lequel nous vivons est chahuté avec une violence que nous n’avions pas ressentie depuis des décennies. Des peuples entiers fuient la guerre et cherchent refuge en Europe, mais la paix en Europe est elle-même menacée. Les derniers évènements tragiques du 13 novembre laisseront des traces et des chagrins indélébiles. Nous sommes tous embarqués sur le même bateau ivre. Certains se crispent et regrettent « l’Europe aux anciens parapets ». D’autres, et nous en sommes, voient dans ce monde en crise l’occasion de déployer de nouvelles bannières, de solliciter de nouvelles énergies et de redéfinir de nouvelles utopies. Plus que jamais, le monde a besoin de visionnaires. Si nous avons créé depuis six ans déjà le festival Circulations, si nous défendons chaque année une cohorte de jeunes photographes issus de toute l’Europe, c’est parce que nous croyons que les artistes portent à leur façon ce feu sacré. Dans un monde menacé par le repli identitaire et des formes de plus en plus alarmantes de radicalisation, dans une société contemporaine obsédé par la performance économique, c’est à eux que nous nous adressons pour redéfinir les vraies valeurs et reconfigurer notre époque. Nous croyons en eux et nous avons raison. Ils sont 51 cette année à exposer leurs oeuvres au Centquatre-Paris et il faudrait être aveugle pour ne pas voir à quel point leurs images poétiques, irrévérencieuses, incarnées, nous rechargent en énergie – que cette énergie passe par la colère ou le réenchantement, l’humour ou la désillusion.
Comme chaque année, la programmation s’articule autour d’une sélection de 20 artistes choisis après un appel à candidature international. Elle s’appuie aussi sur deux structures invitées – la galerie The library project (Iralnde) et l’Ecal – ainsi que sur une carte blanche passée à Agnes b.qui nous fait l’honneur d’être la marraine de notre 6e édition. Nous avions mis en place Little Circulation(s) l’an dernier. Face au succès de cette exposition à hauteur d’enfants, nous renouvelons l’expérience cette année. Nos enfants sont les citoyens de demain et il n’est jamais trop tôt pour affiner leur perception du monde.
Nous pensons que c’est en confrontant les regards et les idées, en créant des passerelles entre les générations et en multipliant les chambres d’échos entre les peuples que nous parviendrons à créer et maintenir un lien entre nous tous. On pense souvent que c’est le temps qui crée les liens. Mais les évènements en créent aussi. Dans une époque qui tend à nous séparer, créons les bons et beaux moments pour que les liens perdurent et se renforcent.